300 rebelles maoïstes ont attaqué un convoi d’élus locaux du parti du Congrès à New Delhi, samedi dernier, faisant 23 morts et des dizaines de blessés.
La cible : les élus locaux
C’est en faisant exploser une mine avant de mitrailler pendant près d’une heure et demi les véhicules qui transportaient en convoi les élus locaux, que les rebelles maoïstes ont réalisé leur embuscade la plus meurtrière en trois ans, à 375 kilomètres au sud de Raipur, la capitale de l’Etat de Chhattisgarh (l’épicentre de ces violences maoïstes).
Leur cible : des dirigeants du parti du Congrès auquel ils s’opposent, le président de la force anti-maoïste Nand Kumar Patel, son fils Dinesh, et l’ancien ministre de l’Intérieur de l’Etat, Mahendra Karma. A ce triste bilan s’ajoute la mort de cinq policiers et l’ancien ministre fédéral, Vidya Charan Shukla, serait dans un état « grave ».
L’extrémisme naxal : la mort au nom des laissés-pour-compte
La scission maoïste est née de la rupture sino-soviétique en 1964, au sein du Communist Party of India : le Commusit Party of India-Marxist (CPI-M) puis en 1969, le Communist Party of India-Marxist-Leninist (CPI-ML), plus radical. Si des petits foyers de guérillas s’organisent dès les années 60, ce n’est que depuis 1967 que la guérilla maoïste est devenue active dans les régions rurales du Centre et de l’Est de l’Inde. Son objectif ? Entraîner une révolution populaire à partir des campagnes, en se servant des plus démunis : par exemple les Ādivāsī (aborigènes de l’Inde), les sans-terre, les intouchables Dalits.
Présents dans 20 des 28 Etats de l’Union indienne (Chatisgarh, Jharkhand, Uttar Pradesh, Asma, Uttaranchal, Kerala, Tamil Nadu, Bengale Occidental, Gujarat, Andhra Pradesh, Madhya Pradesh, Orissa, Maharashtra et Bihar entre autres), ils seraient entre 6000 et 8000 combattants. Autrement dit, les maoïstes contrôlent la situation dans 165 districts sur un total de 602 : ils recouvrent dans ces zones les impôts des grandes entreprises, construisent les systèmes d’irrigation, se font justiciers, décident de la délimitation de terres entre les paysans, et ont supprimé les mariages entre les enfants. Face à l’ancrage toujours plus fort des maoïstes dans le pays, le premier ministre Singh a déclaré en 2006 qu’ils étaient « devenus le défi interne le plus grand pour la sécurité de l’Inde. »
La traque verte : la chasse aux maoïstes
Le premier ministre a appelé à intensifier la lutte, par le biais notamment de l’opération « Traque verte », lancée en 2009 pour chasser les maoïstes, et qui n’a pas rencontré de réel succès jusqu’à maintenant. Pour mener à bien cette prise de contrôle des « zones rouges » (zones rurales occupées par les maoïstes), des hameaux stratégiques et des patrouilles paramilitaires ont été mises en place sous le nom de Salwa Judum (« Chasseurs de la paix ») qui compteraient environ 5000 membres, soutenus par 2000 policiers anti-terrorisme. La confrontation des autorités indiennes avec les maoïstes est à l’origine de dizaines de milliers de morts depuis les années 60.
Aussi, les attaques ne reculent pas et les moyens d’action des maoïstes sont toujours plus impressionnants, comme le déraillement, suivi de la collision d’un train qu’avait attribué aux rebelles naxalites le gouvernement indien en mai 2010. Qui plus est, il y a de ça à peine quinze jours que trois policiers ont été tués dans l’assaut d’une chaîne de télévision publique.
Face à ce conflit, les intellectuels sont obligés de prendre parti. Les pratiques maoïstes sont certes contestables, mais celles du gouvernement également, qui utilise ses forces paramilitaires pour mener à bien une politique d’industrialisation prédatrice en confisquant les terres et les rivières des peuples ruraux, et faisant fuir des milliers de villageois de leurs foyers.