Le suicide dans les forces armées américaines est une vraie problématique mais aussi un sujet tabou. Depuis la guerre du Vietnam, le phénomène essaye d’être « géré » par Washington. Malgré tout, les guerres du Golfe puis les conflits afghans et irakiens traumatisent les GI’s. La guerre, même ultra moderne, reste un enfer
Depuis que les premiers registres ont été tenus dans le début des années 80, 2007 avait été la première année « noire » de l’US Army avec 115 soldats se donnant la mort. Un état d’urgence et un suivi psychologique sont désormais mis en place pour lutter contre ce fléau. Ce chiffre traumatisant a donc baissé ces dernières années. 2012 s’annonce néanmoins catastrophique. Le macabre record va être battu.
Leon Panetta, le secrétaire américain à la Défense, semble prendre conscience de l’ampleur du problème, il déplore « d’énormes lacunes » et promet du changement lors d’une audition au Congrès le 14 juin dernier. « Nous faisons tout notre possible pour essayer de construire un meilleur système »
Première cause de décès, avant le combat
Il y a désormais un mort par suicide quotidien depuis le mois de janvier 2012. Soit 154 décès en 155 jours. Une hausse préoccupante de 18% par rapport à 2011 sur la même période. Les forces américaines basées en Afghanistan enregistrent une augmentation de 50% sur l’époque similaire. Autant dire que c’est un marqueur évident du durcissement du conflit, à quelques mois du retrait des forces onusiennes.
Au cours du premier semestre de cette année, le suicide est devenu la première cause de mortalité au sein de l’armée. Devançant les hommes tombés au champ d’honneur et ceux victimes d’accidents de la route.
Paradoxalement, ce ne sont pas les soldats les plus exposés qui sont touchés par le phénomène. Le Corps des Marines, souvent voire tout le temps en première ligne a un taux de suicide « stable ». Dans une autre mesure, le personnel qui n’a jamais été déployé dans une zone de combat n’est pas exempt de ce problème. L’US Air Force est la plus touchée par les suicides, et ce ne sont pas les pilotes de combat qui mettent fin à leur jours.
La crise de l’armée ou l’armée touchée par la crise ?
Plusieurs raisons sont avancées pour tenter d’expliquer cette recrudescence du taux de suicide. Problèmes conjugaux, éloignement familial, difficultés financières (la crise des sub-primes touche aussi les militaires) sont évoqués. De plus, beaucoup de soldats ne demandent pas d’aide pour ne pas montrer de signes de faiblesses dans cet univers martial.
Il faut aussi prendre en compte les milliers de cas de syndrome de stress post-traumatique (PTSD, post-traumatic stress disorder) dont le nombre est en constante augmentation chez les soldats américains. Plus de 10 000 cas sont diagnostiqués tous les ans depuis 2007 chez ceux qui ont servis en Irak et en Afghanistan.
Pour la première force militaire mondiale, ces chiffres sont plus que préoccupants. Dans une nation durement impactée par la crise financière globale, l’Us Army reste une immense source de fierté et c’est aussi un des derniers garants de sa puissance à l’international. Si ce monument patriotique flanche, c’est toute l’Amérique qui trinquera.