Lance Armstrong refait parler de lui. Alors que l’USADA accuse le coureur d’avoir tenter de corrompre l’institution anti-dopage, l’américain se présentera le 17 janvier prochain dans l’émission d’Oprah Winfrey. Rédemption en vue ou nouvelle pirouette ?
La tempête ébranle à nouveau le roc Armstrong. L’homme qui avait gravé à sept reprises son nom au palmarès du Tour de France est désormais banni à vie de la discipline et à l’image du personnage, cette affaire dépasse le monde du sport. Le show le plus regardé des Etats-Unis va consacrer une édition spéciale pour Lance Armstrong. Les spéculations sur d’éventuels aveux vont bon train, ils seront tout au plus l’écho des déclarations estivales du cycliste. Il avait renoncé à se battre contre les accusations.
Armstrong, le secret de polichinelle
Les déboires et autres arrangements avec la police anti-dopage d’Armstrong ne date pas d’hier. Positif aux corticoïdes en 1999 durant le Tour de Suisse. Il dégaine un certificat médical post-daté. Aucun soucis, affaire classée.
À partir de 1999, l’Union Cycliste Internationale décide de congeler des prélèvements pour les analyser plus tard, en utilisant les avancées technologiques. Les contrôles ne suivaient pas l’innovation continue en matières de produits dopants. Autre exemple en 2005. Un prélèvement congelé d’Armstrong est analysé. Il est positif à l’EPO. Lance Armstrong échappe de nouveau aux sanctions. Les révélations de 2012 ne sont donc pas inédites, elle révèle seulement au public l’emprise du coureur américain sur la discipline, qui lui doit aussi beaucoup.
Le dopage est-il le problème ?
Le dopage est bien entendu répréhensible moralement. Il semble pourtant intemporel, des premiers Jeux à l’affaire Armstrong. Si le dopage est un problème, la lutte qui s’est organisé contre lui aussi. La pratique est tellement répandue et indispensable au spectacle que la lutte anti-dopage permet de légitimer le dopage. Cela sert le dopage. C’est devenu une couverture qui crédibilise la course. Quand des équipiers d’Armstrong quittaient son équipe, 18 mois plus tard maximum, les coureurs tombaient. La lutte-antidopage peut être alors une arme qui ouvre la voie au podium.
Survient la question qui fâche : faut-il légaliser le dopage ? Pour certains spécialistes, c’est impossible car « les sportifs sont des junkies ». Richard Virenque, l’ancienne star française du Tour a avoué prendre jusqu’à 300 piqures par semaine à son « top ». De plus, les morts de dopage ne peuvent pas être légitimées. Et puis, personne n’aura les mêmes produits, ce qui repose la question sur l’égalité. Ajoutons pour la forme le problème par rapport aux sportifs non dopés, qui n’existeront plus en cas de légalisation du dopage.
Armstrong : le cyclisme moderne
Sport populaire qui dépassait rarement les frontières françaises et belges, voire hollandaises, l’américain a révolutionné le cyclisme. Lance Armstrong a réellement internationalisé ce sport à l’image vieillotte.
Armstrong a ouvert le marché anglo-saxon. Il porte les Etats-Unis et son influence sur ses épaules. Autre fait remarquable qui explique son aura et la dimension qu’il a pris au fil des années : sa régularité. Il n’a jamais failli. Malgré quelques baisses de régime sur certaines étapes du Tour de France, il a toujours montré au peloton qu’il était le plus fort.
Cette régularité a aussi séduit et mis les confiance les sponsors. Si ce sont eux qui sont le nerf de la guerre, l’argent, ils ne font pas non plus le sport. Le sport, et le cyclisme, n’appartiennent pas aux sponsors, ni au public, mais aux stars. Ce sont les égéries qui le font vivre. Le sport appartient à ses leaders. Armstrong fut sûrement le plus grand d’entre eux.
Le sportif politique
Aujourd’hui, les Messi et les CR7 sont anesthésiés par l’argent. Ils n’ont plus de rôle « politique » comme pouvait l’avoir Maradona. Lance Armstrong, à travers sa fondation, LiveStrong et le carnet d’adresse qu’il s’est construit, a pu s’extraire au-delà de son statut de star incontestée du cyclisme pour devenir une star internationale. Le sujet Armstrong est ici dépassé par celui du Charity Business et ses dérives.
Le sportif ne représente pas non plus la personne. Ce sont les agents puis les sponsors qui façonne l’image du sportif qui peut être diamétralement opposée à celle de l’individu. Juger Armstrong sur cette affaire est compréhensible mais il ne faut pas oublier la performance extraordinaire de remporter 7 fois la course de vélo la plus dure et la plus prestigieuse du monde. Qui plus est, le peloton est majoritairement dopé.
Un Tour de France dépendant
L’affaire Armstrong est un éclairage sur sa personnalité. Manipulateur dans le peloton, il semait la terreur et pouvait faire avorter une échappée d’un regard. Le personnage c’est aussi défait de l’influence de ses sponsors qu’il dominait en négociant âprement ses contrats.
Le vélo, et son épreuve phare, le Tour de France étaient dépendants de Lance Armstrong. Dès 2006, cette terne édition verra Floyd Landis, ancien coureur de la Fonac et de l’hémocompatibilité, sacré pour 10 jours. Les sponsors commencent à ranger le vélo et les audiences dégringolent. L’absence de l’américain y est pour beaucoup.
L’UCI, le groupe Amaury et Armstrong se réunissent pour préparer le retour du champion. Damien Ressiot, journaliste de l’Equipe, reçoit une note du groupe Amaury, propriétaire du journal, qui lui somme de ne plus mettre en œuvre sa force investigatrice dans le cyclisme.
Le cyclisme professionnel retrouve ses bonnes habitudes et son champion. Le secret de polichinelle sur le cas Armstrong va encore durer quelques années. L’enquête couperet de l’USADA n’est donc que l’épilogue de la saga Lance Armstrong. Les probables révélations de Lance Armstrong le 17 janvier prochain risquent de faire du bruit s’il décide de s’épandre sur le système qu’il a crée avec l’aval d’une partie des représentants du cyclisme international.