[Interview] - Breakfast in Backstage : le rock, c’est pas sorcier !

Pour tous les aspirants-rockers de la nouvelle génération, Breakfast in Backstage est l’émission rock incontournable sur le web. J’ai donc pensé qu’il serait judicieux de rencontrer les deux personnages à l’origine de ce projet pour une interview.
2014 : « une année clef dans l’histoire de notre culture… de notre vie ; depuis plusieurs mois, on sent dans l’air comme une vibration vague : des mouvements qui, il y a un an encore, n’étaient que des épicentres marginaux, des courants underground. Mais maintenant, c’est au grand jour que nous allons pouvoir nous afficher, désormais au monde nos faces blafardes et nos cœurs couleur de ténèbres car OUR TIME IS UP. »
Ces mots ne sont pas de moi ; ils sont d’Alain Pacadis, légendaire critique rock français décédé en 1986. Pourtant, vingt-sept ans plus tard, la situation est comparable à celle de 1977. À nouveau, si tout fout le camp dans nos vies, le rock nous réunit.
Kevin et Alexis sont - un peu - les Fred et Jamy de la musique. Tels deux rock-critics des années 2010, ils vulgarisent le genre autant qu’ils informent à son sujet. Les puristes pourraient leur reprocher de ne pas être assez précis, qu’importe : leur style plaît au plus grand nombre à une époque où le rock qu’on croyait mort renaît. Stayin’ alive, kids, punk’s dead, rock’s playing / Nobody’s gonna stop it !
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Comment vous êtes-vous connus ?
Kevin : J’ai rencontré Alexis en faisant un article au sujet de son groupe, Lloyd Project, que j’avais d’ailleurs publié sur Roads en mars 2013.
Alexis : L’histoire est un peu plus compliquée que ça. Un soir, je jouais avec mon groupe à Montmartre, et Kévin habitait dans un appartement juste au dessus. Le bruit l’empêchait de dormir, et il est descendu pour râler et faire cesser ce vacarme. Seulement, le concert lui a plu et il est resté. Depuis, nous sommes devenus amis…
Comment vous est venue cette idée de créer Breakfast in Backstage ?
Alexis : Depuis longtemps, je voulais vraiment faire une émission radio sur le rock. Originellement, l’idée était très vague et ça ne m’intéressait pas de le faire tout seul. Et chemin faisant, en discutant avec Kevin qui voulait créer quelque chose au format vidéo, nous sommes parvenus à un accord et c’est ainsi que « Breakfast in Backstage » est née. En fait, il s’agit d’une émission de radio filmée puis diffusée sur le web.
Kevin : C’est pour cette raison que, par exemple, lorsque nous faisons le montage de nos vidéos, nous travaillons toujours à partir de la bande son ; ce n’est qu’après que nous rajoutons les images par dessus.
Quels sont vos objectifs concernant le développement de ce projet ?
Kevin : Des putes et de la coke ! Je plaisante, mais quelque part, même si l’objectif principal et pour nous de prendre du plaisir en travaillant sur ce projet, nous aimerions quand même que cela finisse par cartonner véritablement. Nous n’avons pas d’objectif précis, d’ailleurs, peut-être avons nous déjà atteint le potentiel maximum de BinB en terme d’audience, ou peut-être allons nous encore faire progresser la notoriété de l’émission. À vrai dire, nous n’en savons strictement rien !
Alexis : Et puis, on observe qu’il y a une communauté qui se crée autour du projet, et leur soutien est vraiment quelque chose qui compte pour nous. Leurs messages et leurs réactions nous font vraiment plaisir.
Comment élaborez-vous vos sujets ?
Kevin : Encore une fois, c’est surtout une question de plaisir. Nous travaillons principalement sur ce que nous aimons.
Alexis : On essaye aussi de trouver des sujets qui sortent de l’ordinaire et de les traiter sous un angle original, même si, parfois, ces thématiques ne sont pas vraiment enclines à faire le « buzz ».
Allez-vous rester exclusivement centrés sur le rock, ou comptez-vous étendre les sujets à d’autres genres musicaux ?
Alexis : Nous l’avons déjà fait avec l’électro ou Pop Fiction, mais l’ADN de l’émission est rock. Même si un jour nous décidions d’aborder la musique classique pour un épisode, nous garderions quand même l’âme rock qui fait l’identité de BinB.
Puisque nous parlons de rock, quelles sont vos influences respectives ?
Kevin : Lui et moi partageons le culte de Pink Floyd et de Supertramp. Cependant, j’apprécie beaucoup la new wave alors que lui n’aime pas : son champ d’appréciation s’arrête pour l’essentiel au post-punk que j’apprécie alors que je déteste le punk et que lui aime. Globalement, j’aime la musique qui t’emmène sur la lune, pas celle qui te maintient au sol.
Comptez-vous conserver le même format d’émission ?
Alexis : Le format évolue déjà de lui-même. Notre dernier épisode dure déjà plus de seize minutes ! Nous avons souvent plein de choses à dire et on nous souhaiterions pouvoir encore rallonger le format. Mais plus c’est long, plus c’est compliqué de faire un produit de qualité. Il est probable qu’un jour nous fassions un documentaire beaucoup plus long que ce que nous faisons actuellement mais, pour le moment, je pense que nous manquons un peu de maturité et d’expérience pour diriger un projet aussi ambitieux qu’un documentaire grand format.
Peut-on vous qualifier de « youtubers » ?
Kevin : C’est presque une insulte de nous qualifier comme cela ou du moins c’est réducteur, parce que Youtube est, tout simplement, le medium de demain et que justement, tous les « youtubers » n’ont pas seulement la volonté de faire rire : poursuivent des objectifs plus pédagogiques (comme E-Penser, Axolot, le Fossoyeur de Films, etc.). Il existe des choses excellentes sur Youtube mais c’est comme à la télévision : TF1 et Arte ne poursuivent pas les mêmes objectifs.
Alexis : Quand tu dis : « je suis « youtuber », les gens ont instinctivement tendance à te prendre pour un guignol qui fait des vidéos marrantes depuis sa chambre. Certes, nous aussi faisons des blagues face à la caméra, mais le but premier de notre projet et quand même pédagogique et culturel, avant d’être un pur divertissement.
Comment faites-vous pour monétiser vos productions ?
Kevin : On ne monétise pas. Le seul argent que nous recevons provient des rares gens qui nous soutiennent financièrement via Tipeee.
Alexis : Ce sont des pourboires, des « tips », ni plus ni moins. Et malheureusement, nous ne pouvons pas monétiser BinB pour une raison très simple : dans tous nos épisodes, nous utilisons des extraits de morceaux et des images d’archives qui ne nous appartiennent pas. Il serait donc malhonnête de réaliser des bénéfices, et si nous le faisions sans l’accord des artistes concernés, nous risquerions d’avoir de gros problèmes avec les labels qui, probablement, n’hésiteraient pas à nous poursuivre.
Ne craignez-vous pas qu’à terme, en restant dans ce modèle économique peu rémunérateur, le risque d’abandonner le projet devienne très important?
Kevin : On est pas l’abbé Pierre, ne t’inquiète pas.
Alexis : À l’origine, nous ne nous sommes pas lancés dans BiB pour faire du blé. Mais il est vraisemblable de dire que nos travails « alimentaires » passent, pour le moment, en priorité avant notre projet. L’objectif, à terme, serait de faire produire l’émission en la vendant à une boîte de production qui pourrait nous offrir une rémunération financière suffisante, ainsi que des moyens supplémentaires pour améliorer encore Breakfast in Backstage.
Kevin : Un seul bémol à ce que dit Alexis : Nous ne sacrifierons pas, pour quelques deniers, notre liberté de ton. Sinon, le plaisir disparaîtrait…
Pourquoi avez-vous décidé de travailler avec Mathieu Sommet, de Salut les Geeks ?
Alexis : J’ai d’abord rencontré Mathieu à une soirée, bien avant la naissance de Breakfast in Backstage. Lui et moi avions sympathisé, mais je n’étais pas un adorateur absolu de son émission. Cependant, j’ai gardé le contact avec lui et quand Kevin et moi avons lancé BinB, il nous a donné un coup de pouce en parlant de nous sur sa page. Honnêtement, son aide nous a vraiment aidé à nous faire connaître.
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