Qui contrôle la graine contrôle le monde. La domestication des plantes remonte aux VIIIe siècle avant Jésus-Christ et depuis ces temps immémoriaux, les paysans utilisent les produits qu’ils récoltent pour en prélever les graines et renouveler les stocks pour la saison suivante. Ce qui semble être d’une logique agraire sans faille est aujourd’hui un délit.
En 2010, deux chercheurs de l’Institut National Recherche Agronomique, Léon Guéguen et Gérard Pascal, ont publié une étude qui affirme que «la réduction des intrants chimiques, qui favorise la production par la plante de substances anti-oxydantes bénéfiques, favorise aussi celle de métabolites secondaires et toxines naturelles dont l’innocuité n’est pas garantie».
En clair, si vous arrêtez d’asperger de pesticides vos cultures, elles développeront elles-mêmes des toxines potentiellement dangereuses, donc mieux vaut en rester aux pesticides. Les deux ingénieurs ne s’arrêtent pas là : «tous les aliments produits en plein-air, dont la viande, le lait et les œufs AB, sont les plus exposés aux contaminations chimiques microbiennes et parasitaires provenant de l’environnement». Vive poules et porcs élevés en batterie, éclairés aux néons, bourrés d’antibiotiques et gavés aux aliments de synthèse !
On pourrait penser que ces propos émanent d’une multinationale tel que Monsanto, mais c’est l’INRA qui publie ce type de rapport. Léon Guéguen et Gérard Pascal sont par ailleurs des membres éminents du conseil d’administration de l’Institut français pour la nutrition (IFN), qui comprend notamment des représentants de l’industrie agroalimentaire comme Nestlé ou Danone. Si l’INRA est à l’origine un organisme dépendant de l’Etat, 80% ses budgets proviennent de fonds privés, généralement de l’industrie agroalimentaire.
En décembre 2011, les deux chercheurs ont présenté leur étude à l’Assemblée pour entériner un projet de loi sur la distribution des semences en France. Le texte a été voté, ce qui a provoqué l’incompréhension du monde paysan, notamment ceux qui ne sont pas en conventionnel à l’instar des agriculteurs qui ont des exploitations en bio. L’interdiction du potager, c’est ce qu’on peut appeler la privatisation du vivant poussée à l’extrême. Le marché des semences, dans un pays agricole comme la France, représenterait des dizaines de millions d’euros par an.